Le microtontige, délire sculptural moderne

9 juin 2024 0 Par Domi MONTESINOS

Sculpture moderne

En navigation…

Soudain, en pleine traversée Pointe du Bout/Baie des Flamands (2,1 milles nautiques), un dysfonctionnement zigouille la douce quiétude préapéritive dans laquelle je me complaisais.

L’aiguille du cadran indicateur de pression d’huile du réducteur tribord se mit à faire la redoutable « danse de l’essuie-glace » : zéro, à fond, zéro, à fond, zéro… bon tout le monde a compris…

Mauvais signe… Le coucher du soleil est un moment inadapté pour se tracasser avec des trucs qui pourraient très bien attendre demain.

On s’attaque au problème

Samedi matin, la panne est rapidement détectée.
Le capteur est enfermé dans un boitier en acier.
Celui-ci ne s’est pas gêné pour attraper cette maladie honteuse de la ferraille que l’on appelle « rouille » dans le langage populaire des mécaniciens de bateaux.
Subséquemment, le sertissage qui relie les deux parties entre elles fuit comme un vieux sphincter…
J’ai déjà rencontré ce problème, il y a quelques années, sur une pièce similaire, dans des circonstances où j’étais obligé de résoudre le cas grâce à moi-même, avec la b…oite à outils et le couteau.

La débrouille

Ni une ni deux, je décide de faire dans la modernité,
ce qui, pour moi, revient à procéder comme à mes vingt ans (c’était le vingtième siècle…):
Je ne remplace pas, je répare !

Ainsi, le sertissage fuyard se trouve bientôt encapsulé dans une carapace de résine époxy, apte à lui rendre son étanchéité perdue par les outrages du temps.
Quelques heures d’attente pour une polymérisation avancée et ce sera « mieux que le neuf ».

Chez nous, pas de gaspillage

Évidemment, œuvrant avec des quantités de produits qui se chiffrent en centimètres cubes, impossible de préparer exactement la dose désirée.
Alors, une fois le travail accompli, il reste un peu du précieux mélange réparateur dans le fond du gobelet. Et il n’est pas question de le jeter.

C’est à cet instant précis que jaillit une idée, que d’aucuns pourraient qualifier de saugrenue, alors que moi, pas du tout.
« Pourquoi pas en faire une œuvre d’art ? »
Par contre, autant des idées ordinaires, bâtardes, j’en produis aisément, autant, si je cherche à faire dans le « génial », c’est plus erratique…
Alors, pour le moment, je vais me contenter de laisser le Coton-Tige qui m’a servi de pinceau se faire engluer les pieds définitivement dans le fond du récipient de dosage.
Et puis, on verra demain.

L’art est partout sous les yeux des poètes

Après le café du « ptit déj », une traction vigoureuse sur la tige, à l’aide d’une pince, me permet d’obtenir promptement un triple résultat !!!

  1. Désolidariser l’œuvre de son contenant
  2. Constater que la résine est bien solide, d’où espoir que ma réparation pourrait tenir
  3. Décider qu’il s’agit là d’une création originale !

Je lui attribue illico le nom poétique et évocateur de « microtontige »,
grâce à l’intervention salutaire de Malou qui m’envoie ce message subliminal sur un ton mi- désinvolte, mi- moqueur, mitigé : « on dirait un micro ton truc »…

Le microtontige, oeuvre inédite.
Elle symbolise l’union intemporelle et plasticosensuelle entre la légèreté du coton, le miracle moderne du passage de la résine liquide à l’état solide, grâce à une réaction exothermique, laquelle transcende le capteur fuyard et lui ressuscite sa capacité à ne plus fuir à cause que la résine a bouché le trou, et c’est cool!

Après, je sais très bien ce qui va arriver, maintenant…
je vais être assailli de sollicitations de la part de galeries désireuses d’exposer mon œuvre…
Bon, ben, j’assumerais… c’est ma vie…

Microtontige à l’heure du thé en baie des Flamands,
clin d’œil à mon ami Michel D