Influence de la longueur à la flottaison d’un bateau
Quelle est l’influence de la longueur à la flottaison sur la vitesse d’un bateau?
« Petit bateau, petit problème », disent les gens qui ont un bateau modeste. Oui, mais…
Cette considération populaire est un peu courte. Elle incite à se limiter en taille lors du choix d’un navire.
L’aspect financier semble leur donner raison…
Cependant, il peut être judicieux de comprendre l’influence de la longueur à la flottaison…
Plus c’est long…plus c’est rapide!
Dans la famille très respectable des navigateurs aussi intrépides qu’originaux, certains s’illustrent par des options radicales en ce domaine. Il est intéressant de bien comprendre l’influence de la longueur à la flottaison sur la marche d’un bateau.
Les courts
Parmi les vedettes du moment, je vous propose de saluer bien bas Yann Quenet. Cet homme a traversé le Pacifique sur son voilier de quatre mètres, poétiquement nommé « Baluchon ».
Guirec Soudée est un autre granitique amariné.
Il a conclu une transatlantique d’ouest en est, à l’aviron et sans sa poule. C’était à bord d’une embarcation de huit mètres, ce qui mérite un grand respect.
Quant aux quatre-vingt-quatre concurrents de la mini-transat, ils s’aventurent en haute mer sur des bateaux de 6,5 mètres de long.
Ces navigateurs ont tous fait le choix d’un certain minimalisme…
Les longs
D’autres navigateurs, et pas des moindres, ont fait un choix opposé.
Pour faire court, je citerai les célèbres exemples donnés par Jean-Yves Terlain à bord de « Vendredi 13 », monocoque de 39 mètres.
Il fût bientôt suivi par le délirant « Clubmed » d’Alain Colas 72 mètres !!!
Ces deux personnages ont bien aidé à comprendre l’influence de la longueur à la flottaison sur la marche d’un bateau.
Pourquoi ces démesures ?
L’origine de ces choix audacieux se trouve dans un principe physique connu depuis longtemps. Il énonce que plus un navire est long à la flottaison, plus son potentiel de vitesse est élevé.
C’est vrai lorsqu’il circule en mode archimédien…
Formulé différemment, cela signifie qu’à poids et puissance propulsive égaux, le bâtiment le plus grand sera le plus rapide.
Avec l’avènement des carènes planantes et des plans porteurs hydrofoils, on occulte souvent cette règle de base…
Et ça se comprend aisément puisqu’elle ne s’applique qu’aux bateaux dits « à déplacement ».
Mais, pour tous les autres, elle demeure.
Et c’est pourquoi il est important d’en connaitre l’existence et les conséquences qui en découlent pour réellement comprendre l’influence de la longueur à la flottaison sur la marche d’un bateau.
Ça plane pour certains…
Dans le monde des carènes planantes, une embarcation de 4 mètres fortement motorisée et accessible à un large public peut atteindre 90 nœuds !
Pour l’utilisateur de cet « engin », peu importe la longueur, pourvu que le rapport puissance/poids soit maximum.
Le syndrome du remorqueur
Ceci étant, lorsqu’un navire n’a pas l’aptitude à planer, à cause de son poids ou de ses formes de coque, c’est bien toujours le mode « à déplacement » qui s’appliquera.
Les coques « à déplacement » sont le type même d’unités soumises à la dure loi de la résistance de vague.
Le cas du remorqueur est particulièrement explicite pour comprendre l’influence de la longueur à la flottaison sur la marche de ce type de bateau.
Résultat, en dépit d’une puissance motrice colossale, il est incapable de dépasser sa vitesse de carène, poussant inexorablement devant lui une vague de trois mètres de haut, sitôt sa mission de remorquage achevée.
Pour avancer, il doit bouger une masse liquide équivalente à son propre poids en l’entraînant devant lui et en l’écartant sur les côtés, sans le plus faible espoir de partir en survitesse.
Alors, comment ça se passe ?
Une embarcation qui évolue dans l’eau génère un « système de vague ».
À petite vitesse, on peut observer une ondulation qui se crée à partir de l’étrave.
Plus on accélère, plus cette bosse s’amplifie, en longueur et en hauteur, le long du bordé.
En continuant à pousser progressivement, on va s’apercevoir que cette vague fait toute la longueur du bateau en s’étant largement creusée au milieu.
À ce moment-là, nous avons atteint la « vitesse de carène » de notre canote à déplacement et il va devenir très compliqué de dépasser cette vitesse, liée à la longueur à la flottaison
C’est là que certains types de carènes font la différence
L’architecture navale est un métier fascinant !
Ainsi, il y a quelques décennies, un concepteur, agacé par cette limite de vitesse liée à la longueur, a imaginé un type de forme capable de s’affranchir (en partie) de cette règle physique.
Il a conservé un avant pointu, afin de démarrer aisément, sans « pousser » beaucoup d’eau comme un remorqueur ou une péniche chargée.
Puis il a progressivement « vrillé » les deux côtés de son étrave « couteau » jusqu’à la transformer en une spatule bien plate.
Un « panneau » de chaque bord pour que ça flotte, et bingo, l’ingénieur venait d’inventer la carène planante !
Une révolution architecturale qui a bouleversé le monde du nautisme.
Résultat, lorsque le bateau accélère, la proue se soulève de plus en plus. Elle diminue ainsi la quantité de liquide à déplacer et permet à la partie arrière de « glisser » facilement à la surface de l’eau comme un genre de ricochet motorisé…
Les enseignements qu’il faut en tirer.
Beaucoup de choses sont devenues possibles grâce à cette découverte.
Il y a tout de même des limites.
S’il s’est avéré réalisable d’atteindre des vitesses « élevées », c’est au prix de motorisations pléthoriques et en gardant une grande maitrise du poids.
En clair, dans le monde des coques planantes, la légèreté est un facteur prépondérant pour les performances.
Les fanas de la célérité maximum qui font avancer leurs bolides confortables à coup de centaines de chevaux butent rapidement sur le problème lié à l’embonpoint de leurs machines de propulsion.
Une parenthèse « sécurité »
Imaginons-nous à la place de l’intrépide pilote qui chevauche une embarcation capable de voguer à 60 nœuds grâce à ses deux moteurs de 350 CV !
Bon, bien entendu, il faut une mer bien plate…
Après quelques minutes de griserie, il faudra bien revenir au port, ne serait-ce que pour refaire le plein de carburant…
En arrivant à proximité du chenal d’accès, un panneau rappelle qu’il serait raisonnable de progresser à allure modérée…
Vitesse limitée à trois nœuds dans le chenal
Quand vous descendez de 50 nds à 10 nds, vous avez vraiment l’impression de « rentrer très lentement »…
Sauf que la vitesse de carène de votre « racer », est de 5 nds. Et donc, votre coque n’est plus déjaugée, car vous n’avancez pas assez rapidement pour ça.
Elle est donc en mode « archimédien »… ce que vous pouvez aisément constater en observant, derrière, la monstrueuse vague que soulève votre passage…
Que faire ? Eh, bien tout simplement ralentir encore jusqu’à descendre à 70 % de notre fameuse « vitesse de carène », soit… 3,5 ou 4 nds (3 nds pour un jet ski).
Je sais, on a l’impression d’être arrêté, mais bon.
D’où l’intérêt de comprendre l’influence de la longueur à la flottaison.
Et les voiliers dans tout ça ?
Certains architectes éclairés ont rapidement exploité le concept du « planning » au profit des bateaux à voiles.
Ils ont alors dû déployer des trésors d’ingéniosité.
En effet, lorsque l’énergie propulsive ne peut venir que des voiles, il est impossible d’obtenir des « puissances » comparables à celles de machines thermiques ou électriques.
Si on ajoute à ça l’obligation (pour les monocoques) de transporter du lest, c’est beaucoup moins simple que de préconiser un moteur plus puissant…
Alors, architectes, constructeurs, équipementiers, tout le monde a bossé sur le sujet.
Et ils ont réalisé des progrès tels qu’aujourd’hui, la plupart des voiliers rapides sont capables de s’affranchir de cette sacro-sainte règle.
Le cas particulier des multicoques
Ils sont moins lourdement impactés que d’autres types de bateaux, mais ils le sont tout de même.
Il n’est pour s’en convaincre, que de comparer les chiffres obtenus par un catamaran avec deux motorisations différentes.
C’est encore plus flagrant lorsqu’on explore ce qui se passe en accélérant progressivement.
On constate alors que la vitesse augmente rapidement au début, puis les derniers chevaux ne servent plus qu’à « grappiller » des dixièmes de nœuds.
Et pour le plaisancier « normal » ?
Ah, très bien, parlons donc de ces amateurs de voiliers familiaux qui partagent avec femmes, amis et enfants les joies de la navigation éolienne.
La décision est prise, on arpente les allées du salon nautique en vue d’y faire l’acquisition d’une unité neuve.
Je crois bien que ce sont les critères de budget et de place de port qui pèseront le plus lourd dans la décision finale…
Alors, même convaincu qu’un mètre de plus serait mieux, c’est le portefeuille qui arbitrera…
Par contre, lors de l’achat d’un navire d’occasion, le client doit faire son choix entre un bateau récent, pas très grand, ou bien un autre plus ancien, mais nettement plus long.
Et c’est précisément dans ces circonstances que je crois préférable de donner sa préférence à un bateau plus grand que prévu, surtout dans le cadre d’un projet de voyage lointain.
On subira ensuite sans aucun doute quelques surcroits de tracas, voire de dépenses, liées à la longueur, mais le niveau de confort et la durée des trajets s’en trouveront bien optimisés.
Conclusion
Nos valeureux « minitransateux » sont coincés parce qu’un « mini », c’est 6,50 mètres et puis c’est tout.
De même, celui qui dispose d’une place de port de 10 mètres risque fort d’être handicapé avec une acquisition de 40’.
Cependant que Jeff Bezos fait construire un voilier de 127 mètres !
L’heureux homme n’aura probablement pas le plaisir incomparable de le mener « en famille »…
Mais, bon, on ne peut pas tout avoir.
Par contre, lors du choix d’une embarcation destinée à naviguer vraiment en haute mer, et dans la mesure où le budget le permet,
je conseille vivement de donner la préférence au bateau le plus long en flottaison.
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